Kinshasa : Mamie Kidoka, une convoyeuse qui force l’admiration [Portrait]

Les femmes congolaises exerçant comme convoyeuse (communément appelé  »receveur » ) restent largement minoritaires à Kinshasa.

La rédaction de NOUVEAUMEDIA.CD a déniché l’une d’entre elles sur la ligne Boulevard-Pascal.

Elle, c’est Mamie Kidoka. Cette femme hors commun se consacre à ce boulot depuis plus d’une année  »sans honte ni craintes, sans stéréotypes ni barrières imposées par la société ».

Devant la portière du bus, Mamie Kidoka ne cesse d’attirer la curiosité de plus d’un passant au moindre cri:  »Boulevard-Pascal ».

D’emblée hésitants, les clients réalisent après qu’elle est réellement à son poste de travail comme convoyeuse. Au finish, ils prennent part à bord.

Tout le long du trajet, elle domine la conversation des passagers. Une femme « receveur » : « c’est un cas rare » pour les uns. Et pour d’autres,  »c’est une femme courageuse ».

La cinquantaine révolue, Mamie Kidoka est mariée. Elle est mère des enfants et des petits enfants. N’ayant pas pu terminer ses études secondaires en pédagogique générale, faute de moyens, cette battante a travaillé pendant un certain temps dans une entreprise privée de la place avant de devenir convoyeuse.

« J’ai accepté d’être  »receveur » pour subvenir aux besoins de ma famille ».

Après avoir tenté de commercialiser les sacs de braises sans succès, elle va se retrouver comme convoyeuse grâce à une des ses connaissances.

« Au lieu de croiser les bras, je n’ai pas hésité un seul instant quand  »le président  » Zico Mukanga m’a proposé de travailler comme  »receveur ». Je suis une femme forte, déterminée et battante. J’ai décidé d’oser, pourvu que je subvienne aux besoins de ma famille au regard des maigres moyens de mon mari, surtout qu’à un certain moment, il était au chômage. Je devais donc me battre», déclare-t-elle.

Bien qu’elle soit l’objet de curiosité de certaines personnes, Mamie Kidoka est fière de son travail.

« Il y a certains gens qui cherchent à m’humilier, d’autres par contre, m’encouragent. Sans vous flatter, je me sens épanouie dans mon travail. Je n’ai pas de préjugés. Je travaille avec amour et sans honte, ni complexe. Je ne suis pas comme des hommes (receveurs) qui prennent le risque en s’accrochant au portière de leur bus. J’ai une place assise dans et je m’assois quand il le faut parce je considère ça comme mon bureau. Je m’habille convenablement et surtout en pentalon pour raison de commodité », argue-t-elle.

Les difficultés ne manquent pas comme dans tout travail, tout n’est pas rose pour Mamie Kidoka.

« Nos bus sont gardés à Limete. J’habite Mont-Ngafula. Je suis obligée de me réveiller à 4 heures du matin pour arriver à Limete où sont gardés nos bus à la fin du service », affirme-t-elle.

Et d’ajouter : « Être convoyeuse n’est pas du tout facile. Je me retrouve parfois devant les clients qui refusent de payer la course normalement. A cela, ajouter des personnes qui ne paient pas parce que détentrices d’une carte d’accès gratuit. On est parfois obligé d’avoir des discussions avec cette catégorie des passagers si elles sont plus de deux à bord du même bus. Cela constitue un manque à gagner pour nous ».

La mort dans l’âme, témoigne Mamie Kidoka, le long du trajet, il peut advenir qu’un client mécontent te crie à l’oreille :  »c’est quel travail ! Ma femme ne peut pas faire un tel métier ».

Que les femmes qui attendent tout de leurs maris suivent mon exemple. Cela sert d’exemple aux femmes qui ne travaillent pas, qui ne font que mendier.

« J’admire les femmes qui vendent des oranges, des arachides et d’autres articles à la criée. Elles ont compris que la femme est capable de tenir un ménage en exerçant un métier. Que celles qui attendent tout de leurs maris suivent mon exemple. Il y a autant d’articles à vendre. Mettez-vous au travail », lance-t-elle à ses congénères.

Dina BUHAKE